Homélie prononcée par Mgr Camiade lors de l’inaugurera des travaux de restauration de l’église Saint Nicolas
Lachapelle-Auzac
Homélie prononcée par Mgr Camiade lors de l’inaugurera des travaux de restauration de l’église Saint Nicolas
Lachapelle-Auzac
Homélie prononcée par Mgr Camiade lors de l’inaugurera des travaux de restauration de l’église Saint Nicolas, le samedi 9 avril.
Le Christ est Ressuscité. Nous célébrerons demain le 3° dimanche de Pâques. L’Évangile que nous venons de lire et qui sera lu ce soir et demain dans toutes les églises raconte, la 3° apparition de Jésus à ses disciples, à 7 de ses disciples : Pierre, Thomas, Nathanaël, Jacques, Jean et deux autres disciples non cités. S’il y a 7 disciples présents lors de cette 3° apparition du Ressuscité, ce n’est pas pour rien : ce chiffre symbolique fait référence à la totalité de la communauté des sauvés appelés à se rassembler.
C’est une vision de la Cité céleste.
Ainsi, chaque église, en particulier avec sa nef faite pour rassembler du monde et avec son clocher qui pointe vers le ciel rappelle que la communauté chrétienne rassemblée est une image de la cité céleste, l’assemblée fraternelle de tous les sauvés auprès de Dieu.
Les 7 disciples partent à la pêche et ne prennent rien de la nuit. Au matin, Jésus leur apparaît sur le rivage et il leur propose un petit déjeuner au bord du lac. Pour cela il les invite à lancer les filets de l’autre côté de la barque et la pêche devient soudain sur-abondante, 153 poissons ! Cet épisode est remarquable et peut nous donner l’illusion d’un conte pour enfant qui finit bien. Or, le texte est tout sauf enfantin.
Il met en lumière, de fait, l’échec de la mission des disciples. Ils ont vu Jésus Ressuscité déjà deux fois, mais leur pêche ne donne rien. L’image de la pêche, depuis que Jésus leur a dit "vous serez pêcheurs d’hommes" symbolise la mission de l’Église. Mais cette mission est difficile, souvent d’apparence non productive. Nous voyons bien dans nos campagnes beaucoup d’églises peu remplies. Nous voyons un monde où pourtant l’Évangile st annoncé librement mais où l’égoïsme et la violence paraît souvent l’emporter sur le don de soi et l’amour du prochain.
Les nombreuses persécutions des chrétiens, ou leur écrasement entre les balles sunnites et chiites, leur font quitter massivement certaines régions du monde où pourtant ils étaient depuis vingt siècles.
Du reste, même les chrétiens, c’est souvent souligné, ne sont pas parfaits, pas forcément meilleurs que les autres. L’Église est formée de pécheurs.
Dans l’Évangile, saint Pierre lui-même ne s’exclut pas de la catégorie des pécheurs : on le voit enfiler d’urgence un vêtement dès qu’il reconnaît le Christ ressuscité pour, tel Adam après le premier péché, exprimer sa honte d’être nu.
Le Concile Vatican II a eu le courage de dire que l’Église "enferme des pécheurs dans son propre sein, elle est donc à la fois sainte et toujours appelée à se purifier, poursuivant constamment son effort de pénitence et de renouvellement" (LG § 8).
Dans nos petites communautés rurales nous voyons aussi cette fragilité de l’Église par la difficulté à se rassembler, par la tendance à raviver au moindre prétexte de vieilles querelles ou à se replier dans la peur de toute intrusion, la peur de l’étranger ou la peur de celui qui est différent, qui arrive avec une mentalité difficile à comprendre.
Les communautés chrétiennes doivent sans cesse se réformer. La rénovation d’une église-bâtiment rappelle cela : nos communautés chrétiennes doivent se rénover, retrouver la ferveur de leur foi, la confiance dans leur espérance et la vigueur de leur amour pour chaque personne, spécialement les plus fragiles.
Il ne peut pas, aujourd’hui, y avoir une messe chaque dimanche dans toutes nos petites églises. Même si les prêtres le pouvaient, je crains qu’il n’y a pas de grandes assemblées et c’est encore plus décourageant de se retrouver à 5 ou 6, même si le territoire était couvert. Il vaut mieux se rassembler habituellement le dimanche dans des lieux accessibles au plus grand nombre. Mais ce n’est pas une raison pour abandonner nos petites églises. Il faudrait toujours, ne serait-ce qu’une fois pas mois, ou pendant le mois de Marie ou le temps de Noël autour de la crèche ou pour le chemin de croix de carême qu’il y ait des chrétiens qui viennent prier, même sans prêtre présent. On peut sonner les cloches car peut-être quelqu’un qu’on a pas pensé à inviter ou qui est de passage viendra. C’est cela jeter le filet de l’autre côté comme demande Jésus aux disciples ! Et puis on dit un chapelet ou on relit l’évangile du dimanche et on prend le temps d’échanger sur les soucis du village, de prier pour les malades, ou pour les jeunes qui passent des examens ou pour toutes les intentions du secteur. Ce n’est pas compliqué de prendre ainsi vingt minutes ou une demi-heure dans la semaine pour se retrouver, même à 2 ou 3 chrétiens pour que l’église du village reste un lieu de prière même si elle est moins souvent un lieu de rassemblement. Il n’y a pas que les funérailles qui doivent réveiller nos cloches. Il y a aussi parfois l’occasion d’y célébrer des baptêmes et, de toute façon, d’y prier, le plus souvent possible.
Mais, tant que ce monde est monde, l’Église restera, que nous le voulions ou non, cet "hôpital de campagne" dont parle le pape François : formée de pécheurs qui s’efforcent de se convertir et d’avancer patiemment sur un chemin de sainteté et de guérison.
L’Église, avec patience et parfois sans succès visible comme les disciples qui n’ont pas pris de poisson, travaille au défi de la réparation de la fraternité humaine.
Jésus Ressuscité invite ses disciples à un repas et c’est plein de sens : la vie éternelle que Jésus Ressuscité nous offre est une convivialité ou elle n’est rien. Contempler et louer Dieu ne peut absolument pas être une attitude solitaire. Cela c’est l’enfer, qui est enfermement en soi-même, rumination éternelle de nos frustrations.
N’est-il pas curieux que le Seigneur ait demandé aux disciples s’ils avaient de quoi manger alors que, finalement, c’est lui-même qui fournit l’intendance et prépare le repas ! C’est parce qu’il y a deux aspects de notre Salut : Dieu donne tout gratuitement et, pourtant, il attend notre réponse, notre participation qui n’a pas d’utilité pratique ni matérielle, qui n’est pas toujours aussi efficace que nous voudrions, mais qui est le témoignage de notre générosité et des dispositions de notre cœur à entrer dans la convivialité éternelle du Royaume de Dieu.
Amen. Alleluia.