Alain de Solminihac, évêque de Cahors (1636-1659)
On a beaucoup de peine à imaginer aujourd’hui la misère spirituelle et matérielle du diocèse de Cahors dans le premier tiers du XVIIe siècle ! Les luttes religieuses semèrent en Quercy beaucoup de ruines et de haines. D’actifs foyers protestants s’affirmèrent en Haut et Bas Quercy même si notre province resta majoritairement fidèle à l’Eglise romaine.
Le diocèse de Cahors était alors beaucoup plus grand qu’aujourd’hui (jusqu’à Montauban) : 800 paroisses, 900 prêtres, mais beaucoup ignorants et peu zélés, 300 religieux.
Le peuple, peu instruit, n’avait souvent que des églises ruinées, sans ornements, sans vases sacrés. Le concile de Trente (1545-1563) sut enfin répondre aux besoins par une doctrine claire et rassurante. Louis XIII, authentiquement pieux, possédait les clés de la reconstruction de l’Eglise de France, puisque le roi choisissait les évêques, seuls capables de faire passer les décrets du Concile dans les faits.
Alain de Solminihac, réformateur de l’abbaye de Chancelade en Périgord et pour cela remarqué par Richelieu, reçut, bien malgré lui, le diocèse de Cahors.
Restaurer, instruire, visiter
Dès son arrivée, Alain imposa le retour aux offices dominicaux réguliers et l’adoption du missel romain. Des missions réveillèrent la foi et un catéchisme diocésain en occitan fut distribué.
Lui-même parcourut son diocèse 9 fois, visitant toutes les paroisses qui n’avaient pas vu d’évêque depuis 50 ans. A chaque fois il prêchait, confessait, administrait la Confirmation, consacrait les églises, bénissait les cimetières, chassant le vice sans complaisance pour quiconque.
Alain consacra le ressources de sa charge à équiper les églises en retables, en calices, ciboires, tabernacles, tableaux. Lui-même, refusant de quitter ses habits monastiques, continuait à mener une vie de prière et de privations, très édifiante.
L’évêque et son clergé
L’usage du temps voulait que les titulaires des cures de paroisse soient souvent choisis par les familles seigneuriales, les chapitres de chanoine... qui ne les donnaient pas forcément aux plus dignes. Ceux-là percevaient les revenus et confiaient les tâches spirituelles à des vicaires peu instruits ou étrangers au diocèse, mal payés et peu zélés !
Intransigeant, Alain fixa des règles strictes pour la "mise à niveau théologique" au cours de sessions mensuelles, pour l’obligation de costume ecclésiastique et pour la dignité de vie. Mais surtout il établit en 1643 un séminaire près de St Barthélémy à Cahors encadré par les Lazaristes qu’il obtint de son ami Vincent de Paul. En 1659, 60 jeunes gens y étudiaient. Ainsi les prêtres purent-ils, avec avantage, tenir tête aux pasteurs réformés, ce qui fit grandir le nombre d’abjurations.
L’évêque et les drames de son temps
Baron et comte de sa ville depuis des siècles, l’évêque de Cahors avait alors des responsabilités "civiles". Alain les assuma en consacrant ses ressources à lutter contre la misère (nouvel hôpital, deux orphelinats), contre la peste qui frappa le Quercy en 1652.
Il distribuait argent, blé, remèdes et confessait lui-même les malades reclus. Il intervint aussi contre deux fléaux, l’usure, fille de la pénurie et de la misère et les duels qui décimaient les familles. Sa fidélité au Roi contre les rebelles de la Fronde lui valut les remerciements de Mazarin.
Le rayonnement d’Alain de Solminihac
La poursuite des abus, la raideur de son caractère lui firent beaucoup d’ennemis très bien placés mais la faveur de la régente Anne d’Autriche le sauva de la disgrâce.
Il fut admiré et consulté par ses frères dans l’épiscopat et sa réputation s’établit jusqu’à Rome. L’œuvre dépasse largement le temps de l’épiscopat achevé le 31 décembre 1659, à la mort d’Alain épuisé à la tâche.
Avec François de Sales et Vincent de Paul, il figure parmi les plus grands acteurs de la Réforme catholique dans le royaume. Proclamé rapidement vénérable, il a été béatifié le 4 octobre 1981 par Jean-Paul II.
Son reliquaire, œuvre de l’orfèvre contemporain Goudji et offert par Mgr Gaidon, est visible dans une chapelle de gauche de la cathédrale, derrière le chœur.
Texte d’Etienne Baux
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