Protection du Saint-Sacrement dans nos tabernacles

et la conservation des objets de culte dans nos églises.

Cahors, le 8 juillet 2024
Saints Priscille et Aquila, fabricants de tentes qui accueillaient l’Église dans leur maison

 Note de Mgr Laurent Camiade :

Ces derniers mois, des vols, dégradations et profanations se sont multipliés dans nos églises, voire dans tel ou tel presbytère où des vases sacrés étaient conservés.

Parfois le vol de métaux précieux est la seule motivation qui apparaît. D’autres fois, et cela nous touche plus intimement, les hosties consacrées sont renversées, profanées ou volées, l’on ne sait avec quelle intention. Face à ces derniers cas, je voudrais rappeler quelques principes et donner des indications pratiques. Concernant le risque de vols d’objets de culte, je rappellerai en outre quelques recommandations d’usage.

1. La profanation du Saint-Sacrement.

Chaque fois que le culte du Saint-Sacrement est intentionnellement détourné de ce pour quoi il est fait, on peut parler de sacrilège ou de profanation. « Le sacrilège consiste à profaner ou à traiter indignement les sacrements et les autres actions liturgiques, ainsi que les personnes, les choses et les lieux consacrés à Dieu. Le sacrilège est un péché grave surtout quand il est commis contre l’Eucharistie puisque, dans ce sacrement, le Corps même du Christ nous est rendu présent substantiellement (cf. CIC, can. 1367 ; 1376). » (Catéchisme de l’Église Catholique n. 2120) Celui qui accomplit de tels actes intentionnellement et en pleine connaissance de leur gravité est puni de l’excommunication latae sententiae réservée au Saint-Siège. Notre devoir est d’empêcher cela de toutes nos forces pour n’en être jamais et nullement complices. Les curés ont la responsabilité de ne pas laisser le Saint-Sacrement dans des lieux trop faciles à cambrioler, des tabernacles qui ferment mal ou aux serrures faciles à crocheter.

> Pour sécuriser un tabernacle, il peut être envisagé, en accord ou même avec l’aide des municipalités propriétaires des lieux de cultes, d’y insérer un coffre sécurisé ou d’en changer les serrures quand les portes sont suffisamment solides. La commission d’Art Sacré peut être consultée à ce sujet et apporter son aide.

Lorsque, malheureusement, un lieu de culte est profané, spécialement si le Saint-Sacrement a subi un sacrilège, il ne convient pas d’y célébrer d’acte liturgique sans accomplir auparavant un acte de réparation. C’est la célébration de l’eucharistie qui est l’acte de réparation le plus puissant car elle est communion à la surabondance de grâce venant de la mort et la résurrection du Seigneur, laquelle est seule capable de sauver et réparer pleinement. L’adoration silencieuse permet, en outre, d’exprimer notre amour pour ce sacrement en prenant gratuitement le temps de compenser en quelque sorte le sacrilège par une expression communautaire de notre attachement à la présence réelle du Christ dans l’hostie consacrée. Le cœur du Christ, dans son immense amour, n’a pas eu peur de saigner pour sauver les pécheurs que nous sommes. Peut-être avons-nous conscience que même si nous n’aurions pas cambriolé le tabernacle, nous n’avons pas toujours mis assez de ferveur dans notre relation à l’eucharistie… ainsi pouvons-nous éprouver une certaine solidarité avec ceux qui nous ont choqués en la profanant. Car nous aussi, nous avons une foi fragile, parfois notre façon d’agir est en contradiction avec ce que nous croyons. Et il ne suffit pas de dire « Seigneur Seigneur », mais il faut encore faire la volonté du Père (cf. Mt 7,21). Après avoir communié, sommes-nous toujours guidés par l’amour dans tout ce que nous faisons ou bien profanons-nous aussi nos relations, nos pensées, nos actes ?

A l’inverse, nous ne mesurons jamais le fruit que peut porter un simple acte de foi. Le Christ ne demande que notre foi, une foi qui se traduise par des actes, mais d’abord notre foi en Lui, en la force de sa grâce, notre foi en la grâce contenue dans sa présence quand Il se donne à nous. S’arrêter un moment pour adorer le corps eucharistique de Jésus c’est régénérer nos forces spirituelles, les mobiliser et les laisser grandir en contact avec le Seigneur qui est présent. Lui seul peut sauver les pécheurs que nous sommes, Lui seul peut toucher le cœur des bandits et des sacrilèges et leur donner la grâce du repentir.

En cas de profanation,

  • Avertir l’évêque ou le vicaire général.
  • Célébrer un acte de réparation : il convient d’inviter le Peuple de Dieu à une célébration organisée à cette seule intention, en s’appuyant, comme l’indique le code de droit canonique (CIC n. 1211), sur les rites de la « Supplication publique en cas de profanation d’une église » (Cérémonial des évêques n. 1070-1092), dont on trouvera en Annexe 1 les éléments principaux. Il pourra s’agir d’une messe de réparation ou d’une célébration de la Parole pénitentielle (Cérémonial des évêques n. 1092). Par ailleurs, au cours de cette célébration, il pourra être fructueux de faire connaître et réciter ensemble une prière spéciale comme celle recommandée par l’ange aux voyants de Fatima (voir en Annexe 2).
  • Si le tabernacle a subi une effraction, l’on n’y déposera de nouveau le Saint-Sacrement, que lorsqu’il aura été remis en état et sécurisé.

2. La protection des objets de culte.

Je ne fais ici que rappeler quelques conseils fréquemment donnés.

L’inventaire des objets conservés dans l’église est, en principe, disponible auprès du conservateur des antiquités et objets d’art (CAOA*) du département. Actuellement, il s’agit de M. Guillaume Bernard* qui est, par ailleurs, un chrétien engagé dans la paroisse de Cahors.

La responsable diocésaine de la Commission Diocésaine d’Art Sacré, Mme Marie-Madeleine Rey, est à la disposition des curés et recteurs pour les aider à discerner les objets de valeur à protéger et dresser des inventaires avec photos, quand il n’y en a pas déjà. En outre, le service peut, éventuellement, à l’échelle d’une ou plusieurs paroisses, d’un doyenné ou du diocèse, proposer des formations, par exemple pour connaître les métaux précieux ou identifier les objets de valeur, à destination des personnes qui s’occupent de la sauvegarde des églises.

Voici le rappel de quelques recommandations :

  • Apprécier les possibilités d’accès de vos églises (barreaux aux fenêtres, solidité des serrures…) et s’assurer d’avoir la liste de ceux qui en ont les clés (à ne pas multiplier), recommander aux sacristains et ouvrant d’église la vigilance et de signaler très vite toute défaillance éventuelle des fermetures.
  • Éviter de cacher la clé de la sacristie et celle du tabernacle dans des lieux trop évidents, facilement accessibles (sous la nappe du maître autel pour ne citer qu’un exemple !).
  • En cas de travaux dans l’église, si les sacristies doivent être ouvertes par les ouvriers qui n’ont habituellement aucun soin de surveiller quoi que ce soit, stocker tous les objets de valeur dans un autre endroit pour toute la durée desdits travaux.
  • Il est plutôt recommandé de ne pas laisser toujours fermée une église car les voleurs savent alors que personne n’y vient jamais, tandis que si elle a des jours ou des heures d’ouverture, les visiteurs potentiels dérangent les cambrioleurs. Fermer la nuit ou éventuellement aux jours et heures où des enfants désœuvrés risquent de venir y faire des bêtises est, en revanche, recommandé.
  • Sécuriser des œuvres en plaçant par exemple les petits tableaux en hauteur, en faisant sceller les statues à leurs socles, en plaçant si besoin une protection électronique est souvent utile.
  • Éviter de laisser traîner une échelle qui pourrait offrir des accès indésirables.
  • Charger quelqu’un de photographier et inventorier tous les objets de culte s’avèrera très utile en cas de disparition pour s’assurer de ce qui manque et déposer plainte. Il sera intéressant de distinguer les objets datant d’avant 1905, le plus souvent propriété de la commune et ceux datant de plus tard, généralement propriété de la paroisse.
  • En cas de vol, prévenir le CAOA* et déposer plainte le plus rapidement possible. Lorsqu’on découvre tardivement la disparition d’objets, ne pas hésiter malgré tout à déposer plainte.

J’ai bien conscience que, comme curés, affectataires de nombreuses églises, vous avez sur les épaules une lourde charge, entre autres, en matière de sûreté de celles-ci. Quand une tuile tombe, celle-ci tombe toujours en un certain sens sur la tête du curé ! Il peut donc être judicieux de désigner un (ou plusieurs) délégué pour le patrimoine de la paroisse qui pourra siéger éventuellement au conseil économique paroissial. Ce délégué pourrait vous décharger d’une grande part de votre tâche en ce domaine. En revanche, pour ce qui est de la protection du Saint-Sacrement, si des membres d’EAP ou des sacristains peuvent y être sensibilisés, ainsi que bien sûr des vicaires ou des diacres s’il y en a, ou encore les personnes qui portent la communion aux malades (nécessairement formées pour ce ministère), la vigilance doit rester parmi les priorités du curé. Je vous remercie de tout cœur pour votre dévouement que je sais énorme à l’ensemble de votre charge. C’est le lieu et le moyen principal de votre sanctification. Et cela fait grandir l’Église, communion des fidèles du Christ.

Que le seigneur vous bénisse.

+ Mgr Laurent Camiade

 Annexes :

1. Le rituel de la « Supplication publique en cas de profanation d’une église » (Cérémonial des évêques n. 1070-1092) indique qu’il n’est pas permis de célébrer d’action liturgique dans l’église profanée avant d’avoir accompli un rite pénitentiel en réparation. Il précise ensuite qu’il serait bon, le plus tôt possible, de :

  • Faire présider l’évêque si cela est possible, les prêtres en charge de cette église concélébrant, pour manifester que c’est toute la communauté des frères qui croient dans le Christ, et dont l’édifice sacré est le signe et l’image, qui a été blessée ;
  • Utiliser des ornements violets en signe de pénitence ;
  • Laisser l’autel dépouillé, sans fleurs ni luminaires et faire une procession à l’issue de laquelle le célébrant de vénère pas l’autel avant le temps de l’offertoire où l’on prépare l’autel comme dans le cas de la bénédiction d’une église nouvelle ou rénovée (s’il n’y a pas de messe, habiller l’autel selon les mêmes principes puis le vénérer, juste avant le Notre Père qui conclue la célébration de la Parole) ;
  • Pendant la procession d’entrée, chanter le psaume 129 (De profundis) ;
  • Accomplir un rite pénitentiel, l’aspersion d’eau bénite étant recommandée, éventuellement, chanter la litanie des saints pendant la procession ou au moment du rite pénitentiel ;
  • Prendre les oraisons de la messe « de la Sainte Eucharistie » (Missel romain page 1166) ;
  • Choisir les lectures parmi celles proposées pour la messe « pour demander le pardon des péchés » (Lectionnaire rituel pages 1317-1330) ;
  • Prolonger, si on le juge bon, par un temps d’adoration ; dans ce cas, omettre la bénédiction finale de la messe, et après l’oraison post-communion, exposer le Saint-Sacrement, puis bénir le Peuple avec le Saint-Sacrement ;
  • Enfin, déposer le Saint-Sacrement au tabernacle (celui-ci ayant été remis en état et sécurisé).

2. Prière de réparation (usage libre) :

Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime
et je vous demande pardon
pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas
qui n’espèrent pas et ne vous aiment pas.
Très sainte Trinité, Père, Fils et Saint Esprit
je Vous adore profondément et je Vous offre
le très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ
présent dans tous les tabernacles de la terre
en réparation des outrages, sacrilèges et indifférences
par lesquels Il est Lui-même offensé.
Par les mérites infinis de son Cœur Sacré et du Cœur Immaculé de Marie
je Vous demande la conversion des pauvres pécheurs.

(Prière de l’ange de Fatima)

* CAOA pour le Lot :
Guillaume Bernard
Conservateur des antiquités et objets d’art
Portable 06 13 13 92 91
Courriel guillaume.bernard@lot.fr

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