Dimanche 7 juin 2020.

Homélie de Mgr Laurent Camiade

« Dieu a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils unique… dans le monde… pour que par Lui, le monde soit sauvé » (cf. Jn 3,16 & 17).

En quelques mots, l’Évangile de Jean nous ouvre au mystère de Dieu, à l’amour du Père pour le monde, pour nous, pour moi, pour toi. Dieu nous sauve parce qu’Il a de la considération pour ses créatures, Il s’investit pour sauver le monde et son Salut rejoint ceux qui ont foi en Lui, en son amour, son « tellement » d’amour. « Dieu a tellement aimé le monde ». L’Esprit d’Amour qui est Dieu découle du Père qui aime notre monde et s’exprime dans son Fils incarné, envoyé dans le monde.

Nous n’avons pas besoin de faire bonne figure devant Dieu pour qu’il nous aime et vienne nous sauver. Il nous sauve car Il nous aime tels que nous sommes, avec tout ce que nous sommes.

Ce mystère est grand. Le Créateur regarde ses créatures avec bienveillance. Son Fils, sa Parole faite chair, épouse la création, il s’insère en elle, il prend corps dans le créé pour l’élever en l’habitant de son Esprit d’Amour. La Sainte Trinité qui est Dieu ne pouvait davantage se révéler que dans ce mystère de l’envoi du Fils pour sauver le monde. Même la faiblesse et même aussi le péché de la créature peuvent devenir le lieu de la révélation du plus grand mystère : l’amour divin, l’amour du Père par le Fils dans l’Esprit Saint.

Contempler ce mystère de la Sainte Trinité, c’est apprendre à nous laisser aimer par Dieu qui « a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils unique ». Il a envoyé son Fils dans le monde, pour nous, «  pour que par Lui, le monde soit sauvé ».

Cela invite chacun d’entre nous aimer sa propre condition humaine.

Cher frère, aimes-tu ta condition charnelle, ta situation dans le monde, dans ta famille, dans cette humanité plus ou moins malheureuse et pécheresse, dont tu souffres ? Si tu peines à aimer ton insertion dans le monde, sache que Dieu t’aime tel que tu es et qu’il aime ce monde concret et blessé, ce lieu particulier de la création où Il t’a placé. Car il est Père miséricordieux. Il laisse son cœur paternel s’émouvoir profondément par la misère de ta condition, de ta vie concrète.

Le Fils, envoyé dans le monde nous a sauvés et nous a donné le sacrement de l’eucharistie pour offrir ce monde concret que nous habitons, pour l’offrir au Père dans l’Esprit Saint. Ton cœur de créature doit se laisser enflammer par cet amour du Père pour t’offrir sans cesse, le plus souvent possible, en participant au sacrifice eucharistique, par le Christ, Fils de Dieu, avec Lui et en Lui, Dieu, le Père tout-puissant, dans l’unité du Saint-Esprit. Si tu ne peux pas aller à la messe, tu peux aussi faire une communion spirituelle en t’offrant par un acte intérieur de confiance et d’offrande, en union avec l’eucharistie célébrée dans l’Église.

Contempler la Sainte Trinité, c’est assumer ce qu’il y a de beau, de vrai, de bien, dans le cosmos, dans toute l’histoire de la création, pour jouer chacun notre propre mélodie dans le concert de la louange universelle de la terre et des cieux. Pendant le confinement, en faisant moins de bruit, nous avons redécouvert le chant des oiseaux. Ils nous rappellent notre vocation fondamentale à chanter la louange du créateur par le Fils dans l’Esprit Saint.

Contempler la Sainte Trinité nous engage alors, à la suite de Jésus-Christ, le Fils de Dieu sauveur, à l’annoncer aux autres, à nous donner au service des autres par notre travail, notre esprit de service de la société des hommes, afin d’y devenir témoins de l’amour du Père par le Fils dans l’Esprit Saint.

Contempler la Sainte Trinité, c’est nous élever au-dessus de nos petits bonheurs pour ne pas en faire des idoles, pour ne pas faire de l’horizon terrestre de la vie le but final de notre vie. Car un des drames majeurs de notre civilisation brillante et riche, est sa tendance à oublier de regarder plus haut, de se laisser attirer par la beauté du Créateur. En cherchant trop le bonheur à ras du sol elle finit même par détruire ce qui la rend heureuse en abusant des richesses de la terre et en provoquant des injustices et des déséquilibres écologiques.

Contempler la Sainte Trinité remet en nous chaque chose à sa place. Cela nous permet de nous laisser aimer par Dieu et d’apprendre à aimer, d’apprendre à offrir à Dieu nos humbles personnes, tous nos actes et nous les mouvements les plus intimes de nos cœurs.

A Lui tout honneur et toute gloire, pour l’éternité.

Amen.

Mgr Laurent Camiade, évêque de Cahors