3° dimanche de l’Avent 2020

Dimanche 13 décembre 2020.
Homélie de Mgr Laurent Camiade

Mes frères,

Jean-Baptiste est un bel exemple d’humilité, non pas la modestie, mais bien l’humilité, cette vertu qui consiste à s’abaisser, à laisser la place au Christ, à tout mettre en œuvre pour orienter le regard et l’intérêt des autres vers le Christ parce qu’il ne se comprend lui-même que dans le Christ.

C’est étonnant de nous souvenir que Jésus lui-même n’hésite pas à comparer Jean-Baptiste au prophète Élie dont le prophète Malachie annonçait que Dieu l’enverrait avant la fin des temps (cf. Ml 3,23 / Mt 17,12-13), tandis que Jean-Baptiste, lui, déclare sans ambiguïté qu’il n’est pas ce prophète annoncé, qu’il n’est pas Élie. Il ne se définit pas à partir du passé, mais en relation avec le Verbe de Dieu. Il ne dit même pas « je suis celui qui crie dans le désert », mais « je suis la voix de celui qui crie » (Jn 1,23). Il se définit comme la voix d’un autre, un peu comme un acteur de doublage qui prête sa voix à l’acteur l’original pour qu’on entende un film étranger dans notre propre langue. Celui qui crie dans le désert, c’est le Verbe qui, selon l’expression de saint Paul, fait entendre des « paroles inexprimables » (2 Co 12,4), que l’homme n’est pas capable que faire entendre, mais Jean-Baptiste est la voix de ce Verbe dont l’auditoire est un désert car les cœurs disponibles pour l’entendre font défaut. Cette voix fait retentir le cri du Verbe qui appelle à rendre droit les sentiers, à redresser nos chemins tordus pour que le Seigneur nous rejoigne. Jean-Baptiste est la voix qui invite à rencontrer le Seigneur, à découvrir celui que nous ne connaissons pas et qui est pourtant « au milieu de nous » (Jn 1,26).

Celui qui crie dans le désert cherche à nous rejoindre, à nous rencontrer.
Il n’y a pas d’autre façon d’être missionnaire que de se situer par rapport au Christ, au Verbe fait chair, et à rappeler qu’il crie vers nous pour que nous nous disposions à le rencontrer. Etre missionnaire exige la même humilité que celle de Jean-Baptiste. Cela exige de ne pas se prendre pour ce que l’on n’est pas, même si nous imitons des saints ou des personnages bibliques qui nous aident et nous montrent l’exemple, qui prient pour nous et nous soutiennent, même si nous agissons à la manière des apôtres, nous ne sommes pas les apôtres, mais, peut-être, à un moment, pour quelqu’un, nous pouvons être la voix de celui qui crie dans le désert. Il crie dans le désert car nous lui manquons, car il veut nous rencontrer mais, tant que nous restons loin de lui, il reste dans un désert.

L’approche de Noël doit nous inciter à cette attention particulière à notre Sauveur. Il veut nous sauver et Il veut sauver tous ceux que nous pouvons croiser ou rencontrer.
En période de pandémie, il nous est demandé de limiter nos rencontres, de limiter nos contacts humains. Cela nous donne l’occasion d’être plus attentifs à la qualité de ces quelques rencontres et de ces quelques contacts limités qui nous sont offerts. Si ces moments sont ouverts à la rencontre avec Jésus-Christ, si Jésus a une place centrale pour nous, alors, cela veut dire que nous aurons un peu préparé les chemins du Seigneur comme il nous le demande depuis ce désert où nous Lui manquons.

Aujourd’hui, beaucoup de voix sont des voix synthétiques, analogiques ou numériques. Elles portent parfois un écho de celui qui crie dans le désert, mais souvent, elles fascinent et, tout en faisant écran, elles peuvent faire oublier le désert où Dieu crie vers nous. Elles aplatissent, en quelque sorte, les médiations complexes de nos rencontres humaines où Jésus nous offre sa joie. Il est très important de ne pas confondre la joie que le Christ veut nous faire partager et les plaisirs faciles des discours envoûtants ou des belles images qui envahissent notre quotidien. Rendre témoignage à la lumière, selon l’exemple de Jean-Baptiste, c’est rappeler sans cesse que Jésus seul est la vraie lumière qui éclaire nos vies. Cela demande d’approfondir nous-mêmes cette expérience de la présence du Seigneur au milieu de nous. Pour cela, ne nous laissons pas distraire par les paillettes de notre monde, lesquelles, non seulement gaspillent de l’énergie, mais aussi peuvent faire oublier que seul le Christ nous offre la vie et le bonheur éternels.

Demandons cette grâce au Seigneur, par l’intercession de saint Jean-Baptiste, que nous sachions nous abaisser pour laisser la place au Christ. Oui, demandons la grâce d’orienter nos regards et l’intérêt des autres vers le Christ, notre Dieu, notre Sauveur et notre Joie.
Amen.

+ Mgr Laurent Camiade,
évêque de Cahors

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