Dimanche 24 Mai 2020 - 7° dimanche de Pâques

Homélie de Mgr Laurent Camiade

Nous voici au Cénacle avec les Onze Apôtres, quelques femmes dont Marie et quelques proches du Seigneur Jésus.

Ainsi, la première lecture décrit l’attitude des plus intimes de Jésus qui l’ont côtoyé de plus près durant ses quelques trente années de vie terrestre et qui l’ont vu ressuscité durant ces 40 jours entre Pâques et l’Ascension. Leur attitude est très simple : ils sont ensemble, « d’un même cœur », « assidus à la prière ».

Nous pouvons retenir ces deux points à méditer : « d’un même cœur » et « assidus à la prière ».

« D’un même cœur » est une expression qui exprime une communion profonde, une communion de désir, une proximité en même temps qu’un élan commun.

Cela ne va pas toujours de soi dans la vie de l’Église. Sommes-nous facilement réunis d’un même cœur ? N’avons-nous pas tendance à vouloir prier de façon individuelle, selon nos propres intuitions ou notre volonté propre, notre goût personnel ? Bien sûr, il existe des groupes d’affinités, des chapelles, des mouvements ou des associations de fidèles qui rassemblent plus facilement des personnes capables de cette communion spontanée des cœurs. Ces groupes aident à expérimenter la prière d’un même cœur, à cultiver l’attention aux autres, la recherche d’une visée commune. Car même dans un groupe d’amis, il arrive qu’il y ait des divergences à surmonter, des efforts pour s’accorder. Dans n’importe quel mouvement ou association, l’épreuve de l’altérité, de la différence de vues doit être surmontée.

Trop souvent, les difficultés à s’accorder débouchent rapidement sur des ruptures ou des scissions. C’est malheureusement aussi le cas dans des couples. Mais l’enjeu reste précisément de surmonter ces difficultés, par le dialogue, l’effort de compréhension mutuelle, l’attention à la vérité que l’autre porte et qui permet de découvrir ensemble ce que Dieu attend de nous, ce qu’il va nous donner quand nous avancerons « d’un même cœur ». Et l’Église, nos grandes paroisses, nos doyennés, nos diocèses, nos provinces et tous les échelons de la grande diversité ecclésiale ont à ne jamais renoncer à chercher comment avancer vers Dieu d’un même cœur. Nul ne peut réellement accueillir l’Esprit Saint avec la puissance de la Pentecôte s’il n’a pas recherché auparavant cette unité de cœur avec toute l’Église.

Au Cénacle, les onze Apôtres n’avaient pas tous le même caractère, la même histoire, les mêmes références. Il y avait des hommes, mais aussi des femmes. Toute la diversité humaine était en quelque sorte représentée. C’est ainsi et ainsi seulement, en se réunissant par delà nos diversités, que l’on manifeste que l’on compte réellement sur l’Esprit Saint pour unifier totalement nos cœurs dans la même annonce du Christ-Sauveur.

Cela suppose d’intégrer la subtilité des différences culturelles, l’acceptation des différences de point de vue, la bienveillance envers tous, le pardon, le refus de la jalousie, de l’exclusivité, du mépris et des jugements hâtifs. Se disposer d’un même cœur à accueillir l’Esprit Saint, comme les Apôtres au cénacle est d’une grande exigence, mais avant tout un acte de foi dans Celui qui nous rassemble.

Ils étaient ainsi « assidus à la prière ». La prière est intimement liée à notre désir le plus profond. Elle permet de purifier nos désirs en les orientant vraiment vers Dieu qui seul peut les combler. Et ce travail de purification de nos désirs est l’œuvre patiente du Dieu d’amour. Il ne nous force pas le cœur mais accueille patiemment nos bons élans et donne sa grâce en l’adaptant à l’implication de notre libre acceptation.

Ce temps de l’accueil de la grâce nécessite une persévérance, une assiduité. Le plus souvent, il ne suffit pas d’avoir demandé une fois une grâce pour la recevoir. Dieu la donne sûrement, il donne toujours la grâce suffisante. Mais cette grâce que Dieu donne est patiente et elle se fraie lentement un chemin en nous parce qu’elle y rencontre souvent des freins, des résistances, des parties de nous-mêmes qui ne sont pas prêtes à accueillir l’effusion du Saint-Esprit.

Entre l’Ascension et la Pentecôte, c’est toute une neuvaine pour accueillir l’Esprit Saint. Mais c’est en réalité toute notre vie qu’il faut rester assidus à la prière.

Et la prière assidue d’une communauté de foi qui prie d’un même cœur, en communion de fond avec toute l’Église de toute la planète est une prière extrêmement puissante. Dieu va lui faire porter beaucoup de fruit !

En ces temps délicats où les incertitudes sur l’avenir sont nombreuses, prions d’un même cœur avec assiduité. Ouvrons nos cœurs à l’Esprit Saint, laissons-nous transformer ensemble par la grâce du Dieu vivant.

Amen.

Mgr Laurent Camiade,
évêque de Cahors

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