Abus sexuel : geste financier aux victimes

La conférence des évêques de France a voté plusieurs mesures non seulement pour lutter contre les abus sexuels en prenant des moyens, avec l’aide d’organes indépendants (la CIASE : Commission Indépendante sur les Abus Sexuels dans l’Église), pour mieux comprendre ce qui nous est arrivé mais aussi pour la prévention et en vue d’œuvrer à la réparation. La décision la plus forte paraît être celle d’offrir un geste financier à des victimes de prêtres, même pour des faits très anciens où les coupables sont décédés.

A propos de ce travail de réparation, beaucoup de chrétiens ont des difficultés à comprendre en quoi ce ne sont pas seulement les coupables eux-mêmes, en tant qu’individus, qui doivent, après une décision de justice, être punis et réparer. Pourquoi l’Église, c’est-à-dire nous tous, devons-nous œuvrer à la réparation, tandis que nous nous sentons déjà nous-mêmes salis et trahis par des membres de notre Église en qui nous avons fait confiance et qui ont commis des délits et des crimes ? Jamais, en effet, l’Église n’a encouragé personne à commettre des abus sexuels. Mais le pape François, en nous adressant sa Lettre au Peuple de Dieu du 20 Août 2018, nous aide à comprendre qu’il a pu exister dans certains milieux ecclésiaux une « culture de l’abus » qui a favorisé des comportements déviants et même parfois criminels. Nous devons lutter contre cette culture en nous-mêmes et dans nos groupes d’Église. Mais nous devons aussi prendre conscience que l’Église —pas seulement les évêques mais tout le peuple chrétien, parfois aussi les propres parents des victimes—, dans une société où cela était le plus souvent admis, a manqué de clarté dans son regard sur les victimes, imaginant longtemps que les enfants oublieraient, que certains affabulaient, que puisque Dieu pardonne, il fallait oublier, fermer les yeux. Le geste financier ne va pas réparer le mal commis mais il prétend marquer la reconnaissance de la souffrance vécue. Il affirme que nous ne fermons plus les yeux et que nous souhaitons faire quelque chose pour ceux de nos frères qui souffrent, leur dire que nous partageons cette souffrance, qu’elle nous atteint réellement et que, même si nous ne pouvons pas les guérir, nous pouvons leur manifester un soutient concret.

Ce geste n’a pas de caractère judiciaire, c’est un geste gratuit. Il exprime notre changement de regard, notre compassion.

Prions le Seigneur pour que ces décisions et tous ces efforts portent leurs fruits. Avec l’aide de Dieu, une guérison de l’âme est possible.

Mgr Laurent Camiade

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