Vendredi Saint - Cathédrale Saint-Etienne

Vendredi 18 avril 2025.

 Homélie de Mgr Laurent Camiade :

Mes frères,

Contempler la croix de Jésus, sa douleur, l’amour infini qui se manifeste blessé à cause du péché des hommes, blessé à cause de nos péchés est un exercice qui peut sembler austère. Nous pourrions en avoir peur.

Pourtant, de nombreuses personnes, des saints mais aussi, très souvent, les petits et les pauvres de notre société, sont les premiers à se laisser émouvoir par la Passion du Seigneur. Entrer dans cette méditation de la Passion suppose un cœur qui se laisse toucher, un cœur ouvert, peut-être même un cœur blessé et qui accepte de saigner, en quelque sorte, pour pouvoir se sentir réellement proche du cœur transpercé de Jésus.

Dans sa dernière encyclique Dilexit nos sur l’amour humain et divin du cœur de Jésus, le pape François rappelle que cette sensibilité du cœur à la Passion de Jésus est bien davantage une grâce que le résultat de nos efforts. La conscience douloureuse que notre péché fait partie des causes de la souffrance et de la mort du Christ se conjugue avec le désir de consoler Jésus et avec le souvenir joyeux de sa résurrection, de sa victoire définitive sur la mort et le péché. L’attachement à la méditation de la Passion est, en quelque sorte, le fruit d’une expérience spirituelle qui consiste à réaliser que la croix de Jésus a été voulue par Dieu pour rejoindre notre propre misère. Il a été trahi par ses proches pour habiter nos propres expériences de trahison. Il a souffert dans son corps avec la flagellation, les coups, le poids de la croix, les clous et l’étouffement de la crucifixion, pour rejoindre les douleurs humaines, celles des violences de toutes sortes comme celles de la maladie ou les douleurs morales et psychiques de tous ordres. Le pape écrit à ce sujet « Le Ressuscité par l’action de sa grâce nous permet d’être mystérieusement unis à sa Passion. Les cœurs croyants qui font l’expérience de la résurrection le savent, mais ils désirent en même temps participer au destin de leur Seigneur. Ils sont prêts à cette participation par les souffrances, les peines, les déceptions et les peurs qui font partie de leur vie. Ils ne vivent pas ce Mystère dans la solitude parce que ces blessures sont également une participation au destin du Corps mystique du Christ qui marche au milieu du peuple saint de Dieu. » (Dilexit nos n. 157)

Pour entrer dans une telle contemplation, il nous suffit de nous laisser habiter par ce que nous venons d’entendre dans le récit de la Passion. Ce récit peut nous avoir rejoint par tel ou tel détail, ou par son mouvement d’ensemble par lequel Jésus avance résolument vers sa mort pour, comme il le dit à Pilate, « rendre témoignage à la vérité » (Jn 18,37). Nous pouvons alors laisser le Christ, tête de l’Église, nous entraîner dans le mouvement d’amour qui anime ce qu’il y a de meilleur et de central dans son Corps qui est l’Église. Cela suppose d’exposer nos propres faiblesses à cet amour, de laisser Jésus souffrant rejoindre nos peines et les habiter de sa grâce qui est capable de donner sens même à ce qui n’en a pas.

« Par ses blessures nous sommes guéris » (Is 53,5) prophétisait Isaïe. Contemplons ces blessures salvifiques et laissons-nous aimer.

Amen.

+ Mgr Laurent Camiade
Evêque du diocèse de Cahors

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