Jeudi 19 mars 2020 / Solennité de Saint-Joseph

Homélie de Mgr Laurent Camiade

Mes frères,

C’est aujourd’hui la fête de saint Joseph. Mgr de Moulins-Beaufort, président de la Conférence des Évêques de France, nous suggère de nous rappeler que saint Joseph est « patron de la bonne mort. (…) Les hôpitaux, dans les zones où le plan « Blanc » a été déclenché ne laissent plus entrer les aumôniers, même salariés de l’hôpital. Il convient de faire porter dans la prière tous ceux et celles qui vont mourir un peu seuls, les médecins et le personnel soignant faisant tout leur possible. » Nous devons nous associer à cette prière même si nous avons la chance dans le Lot que, pour le moment, les aumôniers et les prêtres peuvent entrer dans les hôpitaux, dans des conditions restreintes mais sur demande des patients et de leurs familles. Prions saint Joseph, patron de la bonne mort, pour ceux qui vont mourir, quelle qu’en soit la cause.

Un autre aspect de la figure de saint Joseph peut nourrir notre méditation en ce jour. Joseph, bien qu’il soit aussi un artisan certainement pas paresseux, est celui qui semble faire davantage quand il dort que pendant ses journées. L’Evangile selon saint Matthieu mentionne le songe pendant lequel Joseph reçoit de l’ange le conseil de ne pas avoir peur. Il peut sans crainte prendre chez lui Marie son épouse. Puis, après la visite des mages, il est averti en songe de la menace d’Hérode et il fuit en Egypte. Enfin, après la mort d’Hérode, il sait aussi par le moyen d’un songe qu’il peut revenir en terre d’Israël. Un quatrième rêve le conduira à éviter la Judée et s’installer à Nazareth. Cela dit, chaque rêve de Joseph conduit à une action. Mais il n’agit pas en aveugle, il se laisse guider par Dieu à travers ces songes. Cela nous ramène à un autre titre de saint Joseph : Joseph, patron de la vie intérieure. Pendant que nos soignants et quelques autres sont très sollicités, beaucoup d’entre nous se trouvent peut-être désœuvrés ou reclus, poussés au silence et à une certaine improductivité. Alors, penser aux songes de Joseph peut nous inspirer.

Il est important de déposer devant le Seigneur notre manière de vivre ce temps très particulier, cette sorte de « fuite en Egypte » d’un genre spécial que nous imposent les mesures sanitaires actuelles. Cette expérience, avec la grâce de Dieu, peut nous enseigner beaucoup sur nous-mêmes, sur la qualité de notre vie intérieure. Peut-être sommes-nous angoissés de ne rien produire, ou contents de nous reposer un peu ou tristes et médusés de penser à tous ces morts, à ces malades, aux conséquences économiques et sociales de la crise… tout cela, le Seigneur attend que nous le lui offrions, comme l’a fait saint Joseph dans chaque situation de sa vie.

Surtout, ce qu’il faudrait éviter, c’est de n’utiliser notre temps réorganisé que pour des distractions ou une agitation propre à étouffer l’intériorisation qui nous est offerte. Il est essentiel également en famille ou vis-à-vis des personnes que nous accompagnons, de ne pas se limiter à des considérations extérieures, aux angoisses matérielles du manger, du boire et du porte-monnaie. Aussi importantes que soient ces réalités, se présente à nous une opportunité pour redécouvrir notre intériorité qu’il ne faut pas laisser passer. Intérioriser ce qui nous arrive est la condition sine qua non pour que cette crise favorise un changement radical de manière de vivre pour toute l’humanité. Sans intériorité, les volontés de changement resteront comme toujours des vœux pieux sans force et sans effet significatif.

Saint Joseph, patron de la vie intérieure, priez pour que nous sachions demeurer humblement et en silence devant Dieu, comme des serviteurs inutiles, profondément disponibles pour tout ce qu’Il nous indiquera de faire.

Amen.

Mgr Laurent Camiade
Evêque de Cahors

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